Prise d’otage

Prise d’otage
(dpa)

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„Si Chypre n’accepte pas un plan de sauvetage agréé par l’UE, sa BCE et le FMI, la banque centrale cessera de lui venir en aide.“

Le propos est clair et il a un nom: le chantage, cumulé à une prise d’otage de l’Etat et donc des citoyens.

Danièle Fonck dfonck@tageblatt.lu

En fait: qui est Chypre et qui sont les Chypriotes?

Beaucoup semblent avoir oublié, à Bruxelles, à Francfort et Washington, que la petite République est devenue Etat membre de l’UE pour des raisons stratégiques. Le territoire de Chypre reste divisé, la partie „européenne“ étant la grecque, l’autre restant turque. Or, les 480.000 habitants qui vivent en Chypre „européenne“ sont loin d’être des gens riches. Il suffit pour cela d’explorer les quartiers moins touristiques de Nicosie et de Larnaka ou encore l’arrière-pays pour y découvrir des gens simples, besogneux qui ne méritent pas de devenir des victimes collatérales d’une crise qu’ils n’ont en rien provoquée.

Peu de piliers

En vérité, l’économie de Chypre repose sur trois piliers: le secteur bancaire, le tourisme, le marché immobilier. Or, ni le second ni le troisième ne sauront pallier à l’effondrement du premier.

Peu se souviennent ces temps-ci de deux faits saillants: a) Chypre a été ruinée par l’effondrement économico-financier grec; b) le rôle joué par la place bancaire chypriote n’est pas nouveau et l’UE aurait, si elle l’avait voulu, pu s’en apercevoir bien avant et réagir. Si tel n’a pas été le cas, c’est que nul ne l’a voulu. Pas plus la Commission européenne que l’eurogroupe ou la BCE.

Drôle de méthode

Il y a donc, dixit l’UE, de l’argent sale russe dans les banques chypriotes. D’où l’idée de le taxer au taux fort. Mais depuis quand l’UE blanchit-elle de l’argent sale? Cet argent devient-il propre parce qu’il a été imposé? Drôle de cohérence!

Et de quel droit des institutions supranationales interviennent-elles directement dans la vie privée et l’intimité des gens en prélevant un impôt sur leurs comptes d’épargne?

Pas étonnant que la fronde gronde.

Dans quel monde vivrons-nous donc demain? Un univers dans lequel un agent de l’Agence pour la santé viendra examiner nos cuisines, un fonctionnaire d’ici ou d’ailleurs inspecter nos chambres à coucher et nos salles de bains? Déjà les assurances essaient d’augmenter (encore) leurs marges bénéficiaires en faisant monter les tarifs pour les fumeurs, les buveurs d’alcool, les malades de ceci ou de cela. Oui, c’est ce qui fait débat actuellement dans les cénacles, même si le commun des mortels ne le sait pas encore.

Taxés d’office, voués à l’austérité, encadrés par des directives en tous genres, l’esprit cadenassé par des lobbyistes qui s’exercent au lavage de cerveau: quelle belle vie, quelle liberté, quelle démocratie!

Toutefois, tous ces acteurs ont pour partie gagné déjà. Car avouons: combien d’entre nous enragent, au quotidien, mais n’ont pas (plus) le courage de monter sur les barricades? Troupeau de moutons, voilà ce que nous sommes en train de devenir. En d’autres termes: „politiquement corrects“. Avec l’assentiment, si ce n’est la complaisance, de trop de médias.

Petite information pour ceux qui ne se souviendraient plus: salarié de la Société Générale, le trader Jérôme Kerviel aurait été responsable de 4,82 milliards d’euros de pertes de sa banque sans que nul ne s’en soit aperçu. En Chypre, le projet de prélèvement sur l’épargne vise à rassembler 5,8 milliards d’euros.

Curieux, n’est-ce pas?