/ Le sous-préfet
Sarkozy désirait un président de l’UE fort, mais ami. D’où l’idée de Tony Blair. Merkel voulait un président faible, d’où le nom de Wolfgang Schüssel.
Le deal s’est donc fait sur un outsider, le Belge flamand et chrétien-social Van Rompuy. Le président aurait apprécié sa discrète efficacité lors des sauvetages de Fortis et Dexia; la chancelière aurait apprécié sa discrétion lors de la faillite d’Opel. Ainsi s’écrit l’histoire et sont désignés les plus hauts dignitaires européens …
Restait à satisfaire le troisième luron, l’ami Gordon Brown. Faute de pouvoir tenir ses engagements face à Blair qui lui avait cédé son fauteuil de premier ministre, le Britannique eut l’assurance de voir son chef de la diplomatie accéder au poste de haut représentant. Mais David Miliband voyant plus loin, il se retira lui-même du jeu et voilà donc Brown contraint de se replier sur Catherine Ashton. Une femme „quota“ n’ayant aucune expérience de la diplomatie au sommet.
On le voit, Jean-Claude Juncker n’avait guère de chance d’être nommé puisque tel n’était pas la volonté de Paris-Berlin-Londres qui se croient tout permis.
Certes, le Luxembourgeois avait des appuis. Mais comme les autres Etats membres comptent pour de prunes, ces soutiens ne pesaient pas lourd dans la balance.
En vérité, le sort du premier ministre luxembourgeois s’est joué bien avant, plus précisément l’année dernière, lors de la présidence française de l’Union européenne.
Nicolas Sarkozy ne pouvant accepter l’idée de quitter cette présidence au terme des six mois convenus, il tentait de devenir une sorte de super président de l’eurogroupe. Un rêve gâché par le Luxembourgeois, qui, en coupant l’herbe sous les pieds de l’ambitieux locataire de l’Elysée, devint l’homme à abattre.
C’est à ce moment précis que Sarkozy décida de rabaisser le premier ministre grand-ducal au rang de sous-préfet. Preuve qu’il faut se méfier de la haine, de la rancune et du mépris des grands, surtout quand ils vous embrassent pour mieux vous étouffer.
Mais demain est un autre jour et au conseil des ministres, une voix est une voix. Il nous appartient de rendre à Monsieur le Président la monnaie de sa pièce. Notamment au conseil des ministres de l’Economie et des Finances, ainsi qu’à l’eurogroupe. Car dans ces domaines, ni Paris ni Berlin ne brillent par l’excellence de leurs résultats …