/ Éditorial: Incertitudes
Ne parlons pas du Myanmar, cette riche ex-Birmanie où rien n’a changé depuis le tremblement de terre de l’année dernière, où une femme prix Nobel vit cloîtrée chez elle depuis près de deux décennies et qui, alors que sa peine – autoproclamée par la junte militaire – viendrait à échéance, se retrouve désormais dans une prison mouroir de la capitale sans que les grands de ce monde fassent des pieds et des mains pour obtenir enfin sa libération et le retour à l’exercice plein et entier de ses droits universels.
Peut-être le problème se situe-t-il là: on a l’impression que les dirigeants n’ont ni visibilité ni approche globale face aux grands enjeux et qu’ils réagissent par à-coups, sans vision à long terme et sans connaissances approfondies des dossiers, se contentant ainsi d’un bénéfice médiatique immédiat et d’autant plus volatile.
On l’a bien constaté avec la guerre d’Irak.
Le but premier fut le renversement du régime, la destitution de Saddam Hussein. Le second objectif fut d’éviter que ce dernier parle. Il fut donc exécuté. Le troisième objectif, le principal, eut été de créer un Irak souverain démocratique sans que l’une ou l’autre composante de la société – sunnite, chiite, kurde – ne fût pénalisée, voire privilégiée. Dans l’immédiat, c’est raté.
La poudrière
Il n’en va guère autrement en Afghanistan. Pas plus que l’Union soviétique de Léonid Brejnev, les Etats-Unis et leurs alliés viendront à bout du règne taliban et de la loi qu’imposent les grands seigneurs tribuns dans leurs montagnes. Or, nul ne sait comment en finir avec une situation qui perdure depuis des décennies, décennies si on veut se limiter à l’histoire récente.
La véritable poudrière de la région Asie-Moyen-Orient, se situe ailleurs, à savoir au Pakistan.
C’est ici que les écoles islamistes forment les cadres, qu’Oussama Ben Laden fait entraîner ses combattants de la mort et que l’imbrication entre partis politiques, armée et terroristes musulmans est à son apogée. Et ce dans un pays qui est une puissance nucléaire grâce aux complicités américaines d’antan.
Mais le Pakistan tout entier pourrait basculer. Il s’en faudrait de peu pour qu’il en fût ainsi.
La partie contrôlée par les tribus qui veillent au strict respect de la charia et traitent les femmes comme des moins que rien, est située à moins de 100 km d’Islamabad, la capitale. Le danger de contamination est par conséquent évident.
S’y ajoute la proximité avec le voisin indien.
Les récents attentats de Bombay ne furent rien de moins qu’un avertissement. L’Inde, il est vrai, n’est pas qu’une victime en la matière.
Depuis 1948 et le conflit du Cachemire (l’Inde et le Pakistan en revendiquent la possession), les relations entre les deux pays sont tendues sans que New Delhi ne s’efforce de changer la donne en profondeur. Or, quel meilleur adversaire dans ce contexte pour des mouvements extrémistes à la Al-Qaida que cette Inde qui se veut moderne, évoluée presque émancipée (si l’on veut oublier les pauvres, les marginaux, les exploités)?
De fait: s’il est, outre la guerre de l’eau qui finira par éclater un jour, un potentiel conflit qui menace, son origine se trouvera au Pakistan.
Se peut-il que les grands commis qui conseillent nos princes soient à ce point distants des réalités du monde qu’ils sous-estimeraient la menace sans pareille?
Danièle Fonck
dfonck@tageblatt.lu
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