Un livre fantaisiste sur l’Holocauste suscite la polémique aux Etats-Unis

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Un livre sur les camps nazis, écrit par un survivant de l'Holocauste mais relatant une réalité fantaisiste, suscite la polémique aux Etats-Unis, où un éditeur a annulé sa publication alors qu'un autre propose de le faire paraître comme une oeuvre de fiction.

 „Angel at the Fence“ (Un ange aux barbelés, non traduit en français) retrace l’histoire, présentée comme étant vraie, d’Herman Rosenblat, un juif rescapé du camp de concentration allemand de Schlieben, qui dépendait de Buchenwald.
Rosenblat, aujourd’hui âgé de 79 ans, raconte que pendant sa captivité en 1945 une petite fille lui jetait quotidiennement des pommes par dessus les barbelés du camp pour l’aider à survivre. Douze ans après, après avoir émigré aux Etats-Unis, il rencontre à New York une jeune Polonaise, Roma Radzicki, qui dans le livre n’est autre que l’enfant aux pommes, et l’épouse. Après cinq décennies de mariage, le couple vit en Floride.
Rosenblat avait d’abord remporté en 1995 un concours littéraire organisé par le tabloïd New York Post avec un premier récit, une version plus brève de la même histoire qui a inspiré un livre illustré pour enfants et un scénario acheté par un producteur de cinéma qui s’apprête à tourner bientôt. Le rescapé des camps a été invité de l’émission très populaire de la présentatrice vedette Oprah Winfrey, qui garantit des ventes record aux ouvrages présentés. „C’est la plus belle histoire d’amour que j’aie connue en 22 ans de télévision“, a dit „Oprah“.
La maison d’édition Berkley Books, une filiale de Penguin, devait publier le livre le mois prochain, mais s’est rétractée après la révélation le 25 décembre par la revue New Republic, se fondant sur les témoignages de rescapés de l’Holocauste et de membres de la famille de Rosenblat, que l’histoire des pommes était fausse.
Historiens et spécialistes ont souligné qu’il était impossible de lancer des pommes au dessus des barbelés vu la configuration des lieux. Rosenblat a admis par l’intermédiaire de son agent que ce détail était sorti de son imagination. Dans un communiqué publié la semaine dernière, Berkley Books a annoncé annuler la publication de l’ouvrage et avoir l’intention de demander „à l’auteur et à son agent de rembourser les sommes reçues à titre d’à-valoir“.
Le film, lui, est maintenu mais sera présenté comme un film de fiction. L’affaire a fait naître un débat sur l’impact du faux témoignage sur la mémoire de l’Holocauste. „Il est malheureux que les gens inventent des histoires, et ce n’est pas la première fois que cela se produit“, a indiqué à l’AFP Michael Friedman, président de l’organisation Brandon Public Relations qui vient en aide aux rescapés de l’Holocauste, dont 60% vivent actuellement à New York, souvent à Brooklyn.
„Oprah Winfrey devrait mieux vérifier les ouvrages qui se réfèrent à cette période de l’histoire. Dans son programme, les livres se transforment momentanément en best-sellers“, a-t-il ajouté.
Emanuel Ringelblum, historien et expert du ghetto de Varsovie, estime de son côté qu’il „n’y a pas de raison pour agrandir ou exagérer quoi que ce soit concernant l’Holocauste“. Cependant, un petit éditeur de White Plains (New York), York House Press, se propose de publier le livre avec quelques modifications. „Nous comprenons l’indignation des historiens qui travaillent sans relâche pour vérifier les faits (…) mais nous pensons que les motivations de Rosenblat sont humaines, et pardonnables“, indique York House Press dans un communiqué.
L’éditeur a „entamé des négociations pour publier une oeuvre de fiction dont le titre provisoire est ‚Une fleur sur la barrière‘, sur la vie et l’histoire d’amour d’Herman Rosenblat“. Selon l’historienne Deborah Lipstadt, spécialiste de l’Holocauste, „l’histoire des pommes va sans doute disparaître de cette nouvelle version“.