Un jeune acteur prometteur, tendre et résolu à la fois

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L’asbl. belgo-luxembourgeoise „Profession: cinéphiles“ a invité à Arlon, au „Ciné Espace“, le jeune acteur Fabrice Adde, âgé de 28 ans, qui donne la réplique à Bouli Lanners, réalisateur et acteur principal, dans le film „Eldorado“. Interview: Delia Pifarotti

Le public a pu voir ce film, défini road-movie, et profiter de la présence de l’acteur avant et après la projection pour lui poser des questions sur l‘œuvre, le travail d’acteur et sa vie personnelle.
„Eldorado“ est un film belge qui a récolté et continue à récolter un vif succès partout où il est à l’affiche. Il a déjà gagné de nombreux prix et à Cannes, où il a été présenté à la „Quinzaine des réalisateurs“, il a été primé par vingt minutes de standing ovation. C’est surtout par sa simplicité apparente sans effets spéciaux hollywoodiens (l’histoire de la rencontre de deux „pauvres types“ et de leur voyage en voiture) et par la richesse du message moral transmis (le voyage en voiture devient un voyage introspectif dans l‘âme des personnages et des spectateurs) que le film passionne et émeut, moments comiques inclus. Bouli Lanners, qui en est à son deuxième film, a sans aucun doute réalisé un petit joyau du 7e art, avec de superbes prises de vue des paysages wallons ressemblant au lointain Montana et une musique adéquatement évocatrice. Avant la projection au „Ciné Espace“, Fabrice Adde s’est entretenu avec nous. Peu éloquent dans le rôle du petit voleur toxicomane, il l’est d’autant plus dans la vie et n’hésite pas à nous confier ses expériences et ses impressions.
„Tageblatt“: Vous êtes français, normand pour la précision. Comment un Normand se retrouve-t-il dans une production belge?
Fabrice Adde:
„Je suis Bas-Normand, en plus!“
„T“ : C’est-à-dire?
F.A.:
„Je suis de la région, où les Américains ont débarqué, vous connaissez, je suppose, Cherbourg dans le Cotentin. Eh bien, j’ai fait en Basse-Normandie deux années de théâtre, mais je ne me sentais pas encore prêt, à ce moment-là, à me lancer dans le milieu professionnel. J’ai ensuite participé à une tournée de spectacles de rue dans les pays de l’Est. Ayant eu envie de m’inscrire à Bruxelles à l’Insass, l‘école de cinéma, j‘étais prêt à passer mon examen d’entrée. Malheureusement, le jour auparavant, en jouant ’La putain respectueuse’ de Sartre, j’ai cassé une vitre, me valant de nombreux points de suture au bras gauche. Le jour de l’examen je n‘étais vraiment pas ’dans mon assiette’ et en plus, comme on appelait les candidats par ordre alphabétique, j‘étais le premier. Bon, soit, j’ai loupé l’examen. Une amie m’a conseillé le Conservatoire de Liège, où j’ai réussi à être admis et je m’y suis diplômé. Voilà, ça va faire bientôt six ans que j’habite à Liège.“
„T“: D’accord, mais votre rencontre avec le réalisateur Bouli Lanners s’est faite comment?
F.A.:
„Eh bien, grâce à un train. Je jouais une pièce à Paris, j’ai sauté dans un Thalys pour rentrer en Belgique et j’ai rencontré le comédien belge Philippe Grand’Henry. On a bu un coup ensemble et il m’a dit que j’avais la tête pour satisfaire son copain Bouli Lanners, qui faisait des castings depuis six mois pour son personnage de toxicomane. Et dire que j‘étais en concurrence avec des grands comme Jean-Paul Rouve et Guillaume Depardieu!“
„T“: Qu’est-ce que Lanners a apprécié en vous?
F.A.:
„Il disait que j’avais ’une capacité au mensonge’. Ouais, les toxicomanes savent mentir si humblement pour mendier du pognon. Pour rentrer dans mon personnage, j’ai observé le milieu des toxicomanes de Liège, j’ai étudié leurs gestes lents, j’ai fréquenté les hôpitaux pour voir comment ils sont, quand ils sont en manque. Selon Lanners, ces gens ont comme des ’anges déchus’, qui auraient pu réussir dans la vie, mais que quelque chose a fait dévier. J’ai travaillé aussi ma voix, pour faire plus vrai. A la fin j‘étais tellement vrai, qu’un policier a failli me jeter du plateau de tournage, si le directeur du film n‘était pas intervenu en lui disant: ’C’est notre acteur principal!’ On a bien rigolé.“
„T“: N‘êtes-vous pas surpris du succès que vous vivez?
F.A.:
„Si, je ne m’attendais pas à ça. Mais je reste les pieds sur terre et je suis prêt accepter n’importe quel rôle, aussi marginal qu’il soit. En ce moment je joue au Théâtre national de Bruxelles.
L’important pour moi, c’est de faire mon métier d’acteur et je crois que le théâtre restera important, même dans ma carrière cinématographique. C’est comme disait le philosophe Alain: ’Chacun a ce qu’il veut!’ Si on a envie de faire du théâtre, on peut le faire même dans un cave avec cinq potes motivés. Celui qui croit avoir du talent et reste juste devant son téléphone en train d’attendre qu’il sonne … eh bien, tout ce que ce mec espère, c’est qu’il ne sonne pas pour ne pas avoir d’emmerdes.“
„T“: Quel est le rôle de la casquette rouge, qu’Elie, votre personnage, trimbale dans le film et que vous avez amenée même aujourd’hui?
F.A.:
(en mettant la casquette): „Elle est tout d’abord un petit clin d‘œil à ’Paris, Texas’ de Wim Wenders et en plus, elle donne à Elie un air de coquelicot. Vous savez, les coquelicots qui ne durent que 15 jours en bordure d’autoroute? Eh bien, ç’est ça, Elie est fragile et la vie est éphémère. Voilà pourquoi je tiens à cette casquette rouge.“
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