/ Mode à Milan: derrière le peps des défilés, le spectre du dépôt de bilan
Habituellement réservé aux VIP, le premier rang du défilé Gianfranco Ferré a accueilli vendredi de drôles d’invités: les trois commissaires nommés par le gouvernement pour gérer IT Holding, groupe propriétaire de Ferré et qui avait été placé la veille sous tutelle en raison de ses problèmes économiques. Cette procédure italienne, censée protéger une société de ses créanciers le temps qu’une solution soit trouvée pour assurer son avenir, avait dans un premier temps été appliquée seulement à la principale filiale d’IT Holding, Ittierre.
Un dépôt de bilan d’IT Holding entraînerait dans sa chute non seulement Gianfranco Ferré mais aussi Just Cavalli (ligne bis de Roberto Cavalli), Galliano, Versace Sport ou encore Malo, griffes gérées sous licence par Ittierre et dont l’avenir reste donc plus qu’incertain. Mini-drame consécutif à cette crise, l’annulation 48H avant sa tenue du défilé Just Cavalli, la moitié des vêtements prévus pour la collection n’ayant pas été livrée par manque d’argent. Sans se laisser abattre, Roberto Cavalli présentait quelques jours plus tard avec succès sa ligne principale homonyme, qu’il gère encore à 100%, avec une collection très sexy toute en transparence et en cuissardes noires zippées. „J’ai décidé de déclarer la guerre à la crise“, a résumé le couturier toscan en présentant ses créations: „nous ne sommes pas en pleine période romantique, il faut attaquer pour gagner“. Nous avons „le devoir d’être optimistes“, a renchéri dans la presse Giorgio Armani, soulignant que le secteur mode avait été ces dernières années „trop euphorique et avait dépensé follement pour faire les couvertures“ des magazines.
„Il faut se rendre compte que beaucoup de magasins vendent de 25% à 40% en moins, que de nombreuses usines ferment“, a ajouté M. Armani, qui a pour sa part fait défiler des femmes „fonceuses, qui ont de la poigne“. Si la semaine de la mode a incontestablement brillé par la créativité et le savoir-faire des collections présentées, la baisse du nombre d’acheteurs présents était flagrante lors de cette édition, certaines grandes maisons de couture qui avaient organisé deux défilés peinant à remplir les sièges réservés aux clients.
Sans compter la désaffection dans le programme officiel de la Fashion Week d’une dizaine de petites griffes qui avaient renoncé à défiler cette saison. La situation globale du secteur mode n’est pas plus rassurante: il y a „un besoin urgent et dramatique“ d’aides gouvernementales pour soutenir la filière, a rappelé il y a quelques jours Michele Tronconi, président de la Fédération textile, habillement, maroquinerie, chaussures et lunettes. A Prato, coeur de l’industrie textile italienne, quelque 8.000 personnes ont manifesté samedi pour défendre leur emploi et interpeller le gouvernement. Ce dernier a promis la semaine dernière que de premières mesures de soutien au secteur seraient „présentées d’ici la mi-mars“. En 2008, la filière textile-mode italienne – 60.000 entreprises pour 513.000 salariés – a accusé une baisse de 3% de son chiffre d’affaires (53 milliards d’euros), selon des données publiées vendredi.
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