Les promesses de la 5G: Une nouvelle ère encore floue

Les promesses de la 5G: Une nouvelle ère encore floue

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La cinquième génération de téléphonie mobile devrait connaître de nombreuses pratiques à l’avenir. Mais son avènement reste encore entouré d’incertitudes.

De Jérôme Quiqueret

Au début du mois de juillet, la principauté de Monaco se déclarait le premier territoire entièrement couvert par la 5G. Pour rafler ce titre, il a suffi que l’équipementier chinois Huawei installe 23 antennes de nouvelle génération sur les deux kilomètres carré que compte le micro-Etat. Le monopole de l’entreprise locale de télécommunication a facilité l’auto-proclamation. Le ministre des Communications et des Médias, Xavier Bettel, a de son côté fait de la présence du Luxembourg parmi les leaders de la 5G une question de souveraineté nationale. „Le gouvernement considère que les réseaux 5G sont essentiels pour permettre la prochaine vague de productivité et d’innovation dans les différents secteurs de l’économie luxembourgeoise“, lit-on dans la stratégie du gouvernement présentée en septembre 2018.

Moins d’un an plus tard, la consultation publique lancée par l’Institut luxembourgeois de régulation (ILR) pour l’attribution de deux des trois bandes de fréquence utilisées par la 5G vient de s’achever. Six entreprises, dont les trois opérateurs historiques, ont manifesté leur intérêt pour la bande des 700 MHz et trois de plus pour la bande de fréquences plus large qui doit former le coeur de la 5G, celle des 3.400-3.800 MHz. L’avenir dira si le nombre de candidats à l’option d’une tranche de fréquence sera le même. L’attribution est prévue d’ici la fin de l’année. Les conditions d’attribution des fréquences ne sont pas encore connues. Le choix de les attribuer aux enchères a rapporté gros à l’Allemagne et à l’Italie: autour de 6,5 milliards d’euros. Ces sommes astronomiques disent combien la 5G promet des recettes juteuses. La Commission européenne a estimé que son déploiement pourrait générer 113 milliards d’euros par an dans l’UE d’ici 2025.

Toujours plus de vidéos

Mais ces prix exorbitants d’acquisition des fréquences pourraient aussi constituer un frein au développement de la 5G, s’ils devaient être répercutés d’une manière ou d’une autre sur les clients. C’est l’inquiétude première de Frédéric Sales, PDG de la société Matooma (pour „Machine to machine“), active dans toute l’Europe de l’Ouest. Il ne ménage jamais sa peine pour répéter aux opérateurs que la participation des industriels n’est pas acquise. Pour stimuler le secteur, le gouvernement a décidé de cofinancer des projets concrets; à portée socio-économique, mettant en oeuvre la 5G. Le 23 juillet, une séance publique était organisée au Cercle Cité pour guider les postulants. La réunion, technique, n’a pas aidé à en savoir plus sur les contours que devrait prendre la 5G au pays. La liste des lauréats publiée en novembre aidera davantage à mieux entrevoir les bénéfices de ce saut technologique.

Il est jusque-là souvent associé à la sécurité routière avec les véhicules autonomes et au secteur de la santé, avec les consultations, voire les opérations à distance. La 5G permettra tout d’abord en colonisant de nouvelles fréquences d’éviter la saturation de la 4G, victime de son succès. Elle devrait faire sentir ses effets technologiques dans trois directions. La plus certaine, c’est que le débit de transmission augmentera pour atteindre jusqu’à 1 GB par seconde, tandis que le temps de latence sera divisé par cent et que le débit en mouvement augmentera. Cela devrait consacrer le règne de la vidéo. Le live et la très haute qualité seront généralisés. „Là où vous faites des photos aujourd’hui, vous ferez demain des vidéos, voire du streaming live“, observe Frédéric Sales. La vidéo qui constituait 59% du trafic en 2017 comptera pour 79% en 2025, selon des projections réalisées par Cisco.

Expériences immersives

La nouveauté trouvera ainsi de nombreuses applications, notamment dans le domaine de la vidéo-surveillance. Elle a en sens l’avantage qu’il n’est pas nécessaire de tirer des fils pour être mise en oeuvre. Ce haut débit et la faible latence rendront aussi beaucoup plus intéressantes les applications recourant à la réalité virtuelle et à la réalité augmentée. Une étude d’Intel estime que ces deux seules techniques vont générer 140 milliards de dollars de revenus entre 2021 et 2028, avec la multiplication des expériences immersives.

Enfin une troisième dimension, est la possibilité de connecter beaucoup plus d’objets que par le passé. La 5G est „l’avancée technologique majeure pour l’internet des choses“, clame le livre blanc du ministère de l’Economie consacré à cette dernière. Là ce n’est pas toujours le débit qui compte, mais les nouvelles fréquences disponibles. Un tiers des objets connectés le seront dans canaux à bas débit. Avec l’avènement de la 5G, les réseaux 2G (pour un message) et 3G (pour une photo ou une petite vidéo) restent utiles. Et la 5G permet d’utiliser tous les types de réseaux, par la technique du slicing, ce qui facilitera les choix des entreprises.

Un relais toutes les douze maisons

Pour compléter et renforcer l’accès en des endroits très fréquentés, occasionnellement ou en permanence, le 5G utilisera aussi les ondes dites millimétriques dans la bande de 26 GHz. Celle-ci, attribuée au Luxembourg fin 2020, requiert une densification importante du réseau de relais, jusqu’à un relais toutes les douze maisons, tandis que les deux premières bandes pourront être exploitées par le remplacement des antennes sur les sites existants. C’est à cause de cette densification du réseau et cette intensification du trafic de données que la 5G suscite des inquiétudes. Une pétition lancée en mars, pour l’interdiction de la 5G sur le territoire, a réuni près de 3.200 signatures. Ce fut insuffisant pour permettre à ses promoteurs d’exposer leurs craintes face aux députés mais assez tout de même pour traduire le degré d’appréhension de la société.

Face aux inquiétudes, le gouvernement affirme le principe de précaution. Son appel à projets publié fin juin oblige les porteurs de projets cofinancés à collaborer pour la mesure de l’impact environnemental. L’obligation a été de nouveau clairement signifiée lors de la réunion du 23 juillet. L’impact environnemental du nécessaire renouvellement des téléphones et du coût énergétique d’un trafic toujours plus grand de données est pour sa part encore inaudible.