ExpositionL’art comme lanceur d’alertes 

Exposition / L’art comme lanceur d’alertes 
A la Möllerei, un rhinocéros blanc du Nord ramené à la vie, et devenant de plus en plus réel grâce à l’intelligence artificielle

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Avec „Earthbound – En dialogue avec la nature“ et „Respire, pour un design climatique“, Belval accueille deux expositions qui aident à prendre conscience des problèmes environnementaux et des solutions pour y remédier. 

Pour Françoise Poos, directrice de la programmation culturelle d’Esch 2022, la „Möllerei“ de Belval prise comme un emblème de la technologie du XXe siècle est une plate-forme de discussion idéale pour confronter le passé industriel au futur digital. Après une exposition réalisée avec le „Zentrum für Kunst und Medium“ de Karlsruhe, c’est cette fois la „Haus der elektronischen Künste“ (Hek) de Basel qui est à la barre pour prolonger une réflexion qui est déjà la sienne depuis plus d’une décennie, à savoir comment la technologie peut nous aider à prendre soin de la planète. 

L’exposition „Earthbound – En dialogue avec la nature“ nous invite en effet à „renoncer à notre perspective égocentrique et à redécouvrir notre relation avec la planète“. Dix-neuf artistes de renommée internationale sont à l’œuvre avec une grande diversité de moyens: intelligence artificielle, réalité virtuelle, installations interactives et immersives, sculptures multimédias et installations vidéo. „La diversité des médias n’est pas seulement une manière de présenter différentes formes artistiques, mais aussi de stimuler différentes perceptions. Le spectateur se retrouve dans une situation plus active et convoie lui-même l’idée de l’artiste“, prévient son co-commissaire, Boris Magrini. 

Dans la „Möllerei“ de Belval, le spectateur est accueilli par „Quantium Memories Probability – Square“, l’œuvre déstabilisante du pionnier de l’esthétique des données, Refik Anadol. Accrochée sur les parois impressionnantes de l’ancien lieu de stockage de coke, un écran propose une image générée par une intelligence artiticielle et des „réseaux antagonistes génératifs“ (GAN), nourris par des millions de photographies de paysages interprétées en fonction des recherches de l’artiste. L’univers tridimensionnel qui en ressort forme „l’illusion d’un paysage ou d’une planète“. „C’est une œuvre esthétique, fascinante, mais aussi peut-être troublante, qui semble nous demander si c’est cela le futur qu’on veut avec le changement climatique“, observe le curateur. 

Cette première œuvre instaure le spectateur dans une ambiance étrange et hypnotique qui ne le quittera plus au long des dix-neuf œuvres qui jalonnent le parcours. À l’étage inférieur, Melodie Mousset propose une œuvre subaquatique à 360 degrés en réalité virtuelle, pour nous reconnecter avec la nature. Des méduses tournent autour de soi. C’est par la voix qu’on peut interagir avec elles. Plus l’on chante, plus elles s’approchent et répondent. Cette interrogation sur la manière dont la technologie numérique peut nous rendre conscients de processus écologiques est poursuivi par l’installation „The Intimate Earthquake Archive“ de Sissel Marie Tonn et Jonathan Reus, qui proposent au visiteur de ressentir dans sa chair, en endossant un gilet spécialement conçu, les tremblements de terre causés par l’être humain via l’exploitation gazière dans les régions hollandaises de Gröningen et Denthe. L’expérience de réalité virtuelle „Atmospheric Forest“ qui permet de visualiser les sécrétions des plantes poursuit le même but.

L’air, richesse invisible

C’est à rendre tangible la qualité de l’air que nous respirons que s’emploie l’exposition „Respire, pour un design climatique“, proposée en parallèle dans la Massenoire. Le Luxembourg y peut comprendre ce qu’il manque à ne pas avoir d’école d’art. C’est l’École nationale supérieure d’art et de design (ENSAD) de Nancy qui propose une expérience visuelle moins clinquante que celle de la „Möllerei“, mais tout aussi instructive. Au cœur de l’exposition, il y a donc la respiration, en tant qu’activité physiologique par laquelle nous éprouvons notre dépendance directe à l’environnement.

L’exposition s’attache à attirer l’attention sur cette richesse invisible et sur sa matérialité. Le premier volet de l’exposition consiste dans la mesure de la qualité de l’air respirée par une trentaine de personnes, suivies dans leurs activités quotidiennes. L’étude révèle que „ce sont nos objets, nos paysages quotidiens et les produits de nos activités que nous respirons [et] redonne à la perception et au vécu personnel leurs rôles dans l’appréciation de la qualité des 15 m3 d’air que nous respirons chaque jour.“ Pour visualiser ce volume, le visiteur est invité à travers un espace délimité par un voile représentant le volume. Et on apprendra par ailleurs que la qualité de l’air dans la Massenoire est dégradée si les portes ne sont pas ouvertes.

Cette prise de conscience de la matérialité de ce que nous respirons doit convaincre de l’intérêt des solutions proposées ensuite. Il s’agit notamment de réhabiliter le chanvre, plante locale, qui pousse vite, ne nécessite pas d’eau ni insecticide et utilisable aussi bien dans le textile que dans la construction. 

À noter que la Massenoire propose également une „escape room“ conçue par des étudiants de la Rotterdam School of Management. Il faut 1.30 h pour s’échapper de l’endroit conçu autour du 12e objectif de développement durable des Nations Unies, à savoir promouvoir des modes de consommation et de production durables.

Infos

L’exposition „Respire, pour un design climatique“ est ouverte tous les jours jusqu’au 25 septembre, sauf le mardi de 11 h à 19 h. L’entrée est gratuite du 4 au 12 juin.
L’exposition „Earthbound – En dialogue avec la nature“ est ouverte les mêmes jours aux mêmes heures jusqu’au 14 août. Visites guidées gratuites tous les week-ends à partir de 15.00 h. Un catalogue de l’exposition sera publiée par Hatjé Cantz durant l’été.