Sonntag7. Dezember 2025

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La spoliation des biens juifs (3)La Shoah à Luxembourg: 80 ans pour sortir du „flou“

La spoliation des biens juifs (3) / La Shoah à Luxembourg: 80 ans pour sortir du „flou“
En juillet 1969 fut inauguré par l’Amicale des rescapés et des familles de disparus d’Auschwitz un monument en l’honneur des Juifs déportés de l’ancien couvent de Cinqfontaines transformé en camp par l’occupant allemand. Alors que le Grand-Duc Jean et le vice-président du gouvernement Eugène Schaus (DP) assistèrent à l’inauguration, l’Etat luxembourgeois fut ensuite aux abonnés absents des inaugurations annuelles jusqu’en 2005. Photo: Jacques Hillion/Fondation luxembourgeoise pour la mémoire de la Shoah

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Pendant son exil à l’étranger de 1940 à 1944, le gouvernement luxembourgeois fut appelé au secours par des Juifs ayant fait leur vie au Luxembourg depuis le début du siècle, mais restés étrangers ou apatrides. Nombreux s’étaient vu refuser la naturalisation dans les années 1919 à 1940. Le ministre d’Etat Pierre Dupong promit en 1944 de les traiter à la Libération de la même façon que les Juifs de nationalité luxembourgeoise: „J’ai soumis à mes collègues la question qu’au nom du World Jewish Congress vous m’avez posée au sujet des Juifs étrangers qui, avant l’invasion avaient leur résidence à Luxembourg. Mes collègues partagent avec moi l’idée qu’il ne peut exister de controverse à ce sujet. Les juifs étrangers, qui avaient leur domicile à Luxembourg jusqu’au moment où ils ont dû fuir devant la menace nazie, peuvent, la guerre terminée, retourner et s’établir à Luxembourg à nouveau“ (lettre de Pierre Dupong au délégué du World Jewish Congress, Dr. Henri Cerf, du 6 juin 1944).

Il n’en fut rien. Par une circulaire du 15 mars 1945, le ministre des Affaires étrangères Joseph Bech et le ministre de la Justice Victor Bodson demandèrent aux représentants diplomatiques et consulaires du Grand-Duché à l’étranger de refuser les demandes de rapatriement de Juifs étrangers ou apatrides. L’antisémitisme des années 1930 perdura après-guerre, comme on peut le constater également dans maints rapports de la police et de la Sûreté quand les Juifs étrangers résidents de longue date voulurent rentrer au pays et en furent dissuadés ou empêchés.

En 1950, la loi sur les dommages de guerre ne prévoyait une indemnisation que pour les personnes de nationalité luxembourgeoise ou pour celles qui avaient été déportées dans un camp de concentration à cause d’actes de résistance contre l’occupant, alors que la législation française par exemple incluait les Juifs dans la catégorie des persécutés „politiques“ à indemniser. Comme l’a formulé Renée Wagener, la loi luxembourgeoise sur les dommages de guerre discriminait ainsi doublement la majorité des Juifs du Luxembourg. Elle n’admettait pas le critère d’une persécution visant les Juifs et excluait en principe tous ceux qui n’avaient pas la nationalité luxembourgeoise. Cette discrimination se poursuivit en 1967, lorsqu’il s’agit de définir les critères définissant les „victimes du nazisme“ et les modalités d’indemnisation des „personnes devenues victimes d’actes illégaux de l’occupant“.

Une mémoire sélective

La mémoire patriotique de l’après-guerre était sélective et ne s’intéressait pas aux Juifs. Il fallut un particulier – Paul Cerf, rescapé de la Shoah en tant qu’enfant caché en France, devenu journaliste – pour tirer au clair le drame que le génocide nazi avait fait subir aux Juifs du Luxembourg. Il n’y eut de centre de recherche sur le Luxembourg pendant la Seconde Guerre mondiale que depuis 2002, mais uniquement sur la Résistance et les Enrôlés de force. Ce ne fut qu’en 2013 que le programme du nouveau gouvernement (LSAP-DP-„déi gréng“) entraîna la création du Centre pour l’étude de l’histoire contemporaine et digitale (C2DH) dans le cadre de l’Université du Luxembourg pour une recherche scientifique sur tous les aspects de cette histoire dont la Shoah.

Dans l’après-guerre, le gouvernement luxembourgeois ne se sentait aucune responsabilité pour la culture mémorielle de la Shoah. La raison officielle en était que le Grand-Duché avait cessé d’exister pendant la guerre.

On se rappelle qu’en France aussi la politique officielle niait pendant longtemps toute responsabilité dans la déportation de Juifs sous Vichy. Le président Jacques Chirac n’avait reconnu publiquement la responsabilité de son pays pour la Shoah qu’en juillet 1995, à l’occasion des cérémonies commémorant le 53e anniversaire de la rafle du Vel’ d’Hiv: „Oui, la folie criminelle de l’occupant a été secondée par des Français, secondée par l’État français.“ Il en est né le rapport Matteotti en 1997 et la réparation des spoliations juives sous le gouvernement Jospin, dont aussi celles de Juifs luxembourgeois ou de résidents juifs du Luxembourg réfugiés en France durant la guerre.

En 2000, le gouvernement luxembourgeois présidé par Jean-Claude Juncker accepta, à la suite d’une proposition de loi de ma part, d’instaurer une commission d’étude des spoliations juives au Luxembourg.

Cette commission remit son rapport en 2009. Mais il fallait d’abord rendre utilisables les archives des dommages de guerre en piètre état pour avoir été inondées dans des caves peu adaptées à la conservation d’archives.

Le rapport de 2009 devait être publié sous forme d’un livre à diffuser largement. Il n’en fut rien. Il resta à l’état numérique. La Fondation qui y était prônée restait lettre morte. En outre, le rapport excluait toute réparation financière des spoliations. Le volet des biens financiers juifs raflés par les nazis fut déclaré clos avant d’avoir été ouvert, car apparemment réglé depuis longtemps par les principales banques de la place.

Rapport Artuso

En 2012, l’historien Serge Hoffmann publia un article au Tageblatt dans lequel il releva le rôle ambigu de la Commission administrative entre le 10 mai 1940 et l’arrivée du CdZ début août 1940 et proposa, à l’instar de ce qui s’était fait alors en Belgique, de présenter des excuses à la communauté juive.

À ma question parlementaire à ce sujet Jean-Claude Juncker répondit qu’il y avait bien un „flou“ qu’il fallait élucider. Il en résulta une commission d’historiens et le rapport Artuso, le débat à la Chambre en 2015, les excuses de la Chambre et du gouvernement à la communauté juive, l’inauguration d’un monument et la création de la Fondation luxembourgeoise pour la mémoire de la Shoah en 2018.

En 1974, le journaliste et rescapé de la Shoah Paul Cerf (1929-2003) publie le premier ouvrage qui retrace le sort des Juifs dans le Luxembourg occupé et leur déportation, avec comme titre principal „Longtemps j’aurai mémoire“. En couverture il utilise une photo de la synagogue de Luxembourg en voie de destruction par les nazis, synagogue construite en 1894 au coin rue Notre Dame-rue Aldringen dans le style néo-mauresque aux éléments byzantins et arabes du Tempio maggiore, la synagogue de Florence.
En 1974, le journaliste et rescapé de la Shoah Paul Cerf (1929-2003) publie le premier ouvrage qui retrace le sort des Juifs dans le Luxembourg occupé et leur déportation, avec comme titre principal „Longtemps j’aurai mémoire“. En couverture il utilise une photo de la synagogue de Luxembourg en voie de destruction par les nazis, synagogue construite en 1894 au coin rue Notre Dame-rue Aldringen dans le style néo-mauresque aux éléments byzantins et arabes du Tempio maggiore, la synagogue de Florence.  

Mais le courage de la politique luxembourgeoise n’allait pas jusqu’à accorder des réparations financières aux derniers survivants du génocide ni à regarder sérieusement le rôle des banques et assurances dans ces spoliations ou encore entamer des recherches de provenance dans les institutions culturelles.

Il fallait pour aller jusqu’au bout de la recherche et de la réparation la pression d’une organisation internationale, la „World Jewish Restitution Organization“, pour aboutir à l’accord du 27 janvier 2021 permettant d’intensifier la recherche historique sur la Shoah à Luxembourg pour sortir enfin du „flou“ si bien nommé.

Ben Fayot a siégé comme député à la Chambre des Députés de 1984 à 1989 puis de 1999 à 2013 et il fut député européen de 1989 à 1999. En 2000, il a déposé une „proposition de loi portant création d’une commission d’étude sur les spoliations des Juifs du Grand-Duché de Luxembourg durant l’occupation nazie“, point de départ de recherches sur les spoliations au Luxembourg. En 2012, à la suite de la lettre ouverte de l’archiviste Serge Hoffmann au Premier ministre dans le Tageblatt, Ben Fayot adressa une question parlementaire au Premier ministre Jean-Claude Juncker au sujet du rôle des autorités luxembourgeoises dans la persécution des Juifs et des excuses à présenter le cas échéant. À la suite de cette question parlementaire, le gouvernement demanda à l’Université du Luxembourg d’entreprendre des recherches historiques sur cette période et ces événements.

Série du Tageblatt: La spoliation des biens juifs au Luxembourg (3)

Le 27 janvier 2021, le gouvernement du Grand-Duché de Luxembourg et les Communautés juives, représentées par le Consistoire israélite du Luxembourg, ont signé un accord relatif aux questions non résolues dans le cadre des spoliations de biens juifs liées à la Shoah. La World Jewish Restitution Organisation en Europe et la Fondation luxembourgeoise pour la mémoire de la Shoah furent cosignataires de cet accord sur les „Outstanding Holocaust Asset Issues“. Dans ce cadre sont prévues e. a. une recherche universitaire indépendante sur la spoliation de biens juifs pendant la Seconde Guerre mondiale dans le Luxembourg sous occupation nazie et une recherche de provenance sur la présence éventuelle d’œuvres d’art et autres biens culturels spoliés aux Juifs, dans les institutions suivantes : Musée national d’archéologie, d’histoire et d’art (MNAHA), les collections de la Villa Vauban-Musée d’art de la Ville et la Bibliothèque nationale du Luxembourg (BNL). L’article de Ben Fayot est le troisième de la série que le Tageblatt et le Luxembourg Centre for Contemporary and Digital History (C2DH), en charge des recherches, consacrent tous les mardis à cette question.


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Das Forschungsprojekt ProviLux – Lange Schatten der NS-Enteignung und Spoliation in der Geschichte Luxemburgs

Hottua Robert
26. November 2024 - 19.51

Herr FAYOT, wieso erwähnen Sie die Nazipropaganda im päpstlichen "Luxemburger Wort" nicht? Der dort befürwortete kriminelle rassische Wahn ist nicht nur für den jüdischen, sondern auch für den medizinischen Holocaust an "rassisch minderwertigen und nutzlosen" Menschen verantwortlich. Das menschenverachtende und menschenvernichtende "Gesetz zur Verhütung erbkranken Nachwuchses" wurde 13. Juli 1933 im Kabinett in Berlin beschlossen und trat am 1. Januar 1934 reichsweit in Kraft. MfG, Robert Hottua, Gründer der LGSP