La pratique de l’achat en vrac se popularise

La pratique de l’achat en vrac se popularise

Jetzt weiterlesen! !

Für 0,59 € können Sie diesen Artikel erwerben.

Sie sind bereits Kunde?

De l’ouverture d’une deuxième boutique OUNI à Dudelange à celle d’Auchan Cloche d’Or, tous les signaux montrent la tendance croissante de l’achat au détail, sans emballage. Les consommateurs y trouvent les moyens de réduire l’impact de leur mode de vie sur l’environnement.

Ce n’est pas une nouvelle mode mais bien le retour en force d’une pratique dont les marchés étaient devenus les derniers refuges. Avec un peu de retard à l’allumage sur les pays voisins, la vente au détail, en vrac, se démocratise au Luxembourg.
L’ouverture en décembre 2016 de l’épicerie de produits organiques sans emballage OUNI n’y est pas étrangère. Lancée par une communauté de mille membres, son succès témoigne d’un fort engouement.

„Des demandes nous arrivent un peu partout dans le pays pour ouvrir une boutique“, confie Anne-Claire Delval, chargée de sa communication. Toutefois, pour répliquer le modèle avec succès, il faut remplir deux conditions. La première, disposer d’un local à un prix accessible, n’est paradoxalement pas la plus dure à remplir. Communes ou privés sont prêts à donner un coup de pouce.

Deux ingrédients importants

La seconde condition est de disposer d’une communauté assez forte pour réunir les fonds et disposer d’assez de membres actifs pour gérer la boutique. Ville dynamique, jeune, au fort pouvoir d’achat, seule Dudelange réunit pour l’heure ces deux ingrédients. La campagne de crowdfunding en cours a déjà rassemblé 31.000 des 150.000 euros en vue d’une ouverture prochaine.

Si le vrac séduit, c’est qu’il permet de lutter à la fois contre les déchets d’emballage et contre les déchets alimentaires, tout en favorisant des produits, biologiques, moins nocifs que leurs équivalents industriels. Le vrac permet en effet d’acheter la quantité strictement nécessaire et de ne pas engendrer de déchets, dont le recyclage est énergivore et insuffisant (un tiers des emballages plastiques et la moitié des emballages papiers carton étaient recyclés en 2016 au Luxembourg selon Eurostat).

Efforts récompensés

Le vrac implique un certain nombre d’efforts, notamment parce que le meilleur contenant, le verre, est plus lourd que le plastique. „Les alternatives sont plus écologiques, mais pas nécessairement plus économiques ni plus pratiques“, explique Olivier, cadre quadragénaire, converti au vrac, après être passé au bio. Le vrac est un moyen privilégié pour être la „famille (presque) zéro déchet“ qu’il entend devenir avec sa femme et leur jeune fille.
„Cela suggère une organisation, de partir avec les bons contenants, de savoir en amont ce qu’on va acheter et surtout en quelle quantité. C’est un effort, comme celui que tout le monde a fait il y a dix ans en emmenant ses propres sacs en magasin. Mais, avec le temps, ça devient une habitude.“ La récompense, pour Olivier, ce sont des ingrédients de plus grande qualité et plus frais.

„Le sans emballage, c’est une philosophie, une réflexion, ça demande du temps. Tout le monde n’en a pas forcément à y consacrer“, conçoit pour sa part Anne-Claire Delval. Elle voit les citoyens, et avec eux le monde de la consommation, prendre deux directions opposées, le ralentissement et la sobriété d’un côté, la vitesse et le mirage technologique de l’autre.

La consommation en vrac attire les enseignes

La grande distribution se situe sans doute à l’interface de ces deux mondes. Après les produits bios, la consommation en vrac, qui en est une déclinaison, attire les enseignes.
Depuis le printemps 2018, Cactus propose des rayons „Onverpaakt“ dans huit de ses points de vente, avec 31 produits certifiés bio (fruits secs, légumineuses, céréales, graines, thé et café). En juin dernier, l’enseigne annonçait aussi la fin des emballages plastiques pour la grande majorité des produits biologiques Biog qu’elle vend dans ses rayons.

Avant de développer davantage son offre, Cactus reste prudent. „Bon nombre de produits sont emballés de façon stérile dès leur production: ceci afin de minimiser les risques sanitaires, mais également pour leur donner une durée de vie maximale“, explique Liz Nepper, responsable développement durable au sein du service marketing chez Cactus. „Pour la grande distribution, les alternatives crédibles au plastique – hygiène, étanchéité, durée de conservation, zéro risque de contamination, pas de dissolution, etc.– restent à trouver.“

Promoteur d’une consommation plus durable

Avec l’ouverture de son „lifestore“ à la Cloche d’Or, Auchan a décidé pour sa part de frapper un grand coup. Ses rayons de produits sans emballage comptent 500 références et le magasin est celui du groupe international qui a le plus grand assortiment de liquides en vrac. Par ce choix, Auchan veut se poser en promoteur d’une consommation plus durable. „On se doit de montrer d’autres modes de consommation et de les pousser. On ne dit pas qu’il faut impérativement consommer comme cela. Mais on veut montrer qu’il est possible de faire ses courses avec des solutions zéro déchet“, explique Cyril Dreesen, directeur général d’Auchan Retail Luxembourg.

L’objectif de l’enseigne est de „couvrir l’ensemble des besoins“, tout en privilégiant les partenariats locaux, du Luxembourg et de la Grande Région. Un des prochains développements sera de proposer du lait luxembourgeois au détail. Le magasin propose aussi une solution au problème récurrent de l’achat sans emballage, celui des produits frais tels que la viande, le poisson et le fromage, en permettant aux clients d’apporter leurs écobox, mis en circulation dans les restaurants, pour récupérer leur commande. C’est dire si l’achat en vrac fait partie entière de l’expérience sur laquelle l’enseigne mise avec son „lifestore“ à Gasperich.

Lien et engagement

„Ça va dans notre sens. Ce n’est pas la même philosophie, mais on s’éduque“, s’amuse Anne-Claire Delval. Dans sa boutique où les bois de récupération et les silos en verre sont harmonieusement agencés, OUNI soigne également l’expérience d’achat de ses clients parmi ses 800 références. Elle a sur les supermarchés l’argument supplémentaire de créer du lien social et de l’engagement.

Par contre, elle ne dispose pas de la même force de frappe qu’eux pour négocier avec les fournisseurs et proposer des prix plus abordables. De même, pour OUNI, les contraintes financières en normes et en compétences ne permettent pas de proposer du poisson ou de la viande. Un label de qualité attribué à des professionnels qui partagent leur valeur et chez qui il serait possible d’apporter ses récipients est à l’étude. Une preuve de plus que le développement du vrac en est encore à ses débuts …

Jérôme Quiqueret