ArtsEdward Steichen, ce célèbre inconnu

Arts / Edward Steichen, ce célèbre inconnu
Edward Steichen, self-Portrait avec Camera, vers 1917 2015 The Estate of Edward Steichen / Artists Rights Society (ARS), New York

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La vie fascinante et l’œuvre mondialement connue d’Edward Steichen, photographe américain né au Luxembourg et artiste aux multiples talents, sont au centre de cette nouvelle monographie en allemand.

Gerd Hurm, professeur à l’université de Trèves, propose une interprétation nouvelle de l’œuvre de Steichen tout en expliquant pourquoi, dans les ouvrages sur l’art du XXe siècle, il est rarement question d’Edward Steichen, lui-même artiste avant-gardiste et humaniste. Pour preuve: ses projets artistiques et son engagement en faveur du pacifisme („The Family of Man“), des droits de l’homme, de l’égalité des droits et de l’écologie.

De quoi est-il question? Des multiples vies d’un artiste hors pair, d’un photographe portraitiste, de mode, de guerre, d’objets, publicitaires ou autres, de nature et j’en passe. Mais également d’un peintre intransigeant au point de détruire bon nombre de ses œuvres. Lors de ses séjours en France (Montparnasse, Voulangis), il découvre, enthousiaste, les grands artistes de l’avant-garde qui marqueront l’histoire de l’art: Renoir, Manet, Rodin, Toulouse-Lautrec que l’Amérique verra dès 1908, tout comme Brancusi, Picasso et l’art africain, Matisse, etc. La Galerie 291 attira 160.000 visiteurs et ceci bien avant le fameux „Armory Show“ de 1913 (qui hélas exclut la photographie).

Première exposition personnelle en 1936

Pas moins d’onze chapitres émaillent le parcours du „Lëtzebuerger Jong“ (1879-1973). Ses jeunes années passées sous l’influence des femmes sont peu connues: de sa mère qui, chose rare jadis, pourvoit aux besoins de la famille comme chef d’une petite entreprise de chapellerie, mais aussi de ses sœurs socialistes et suffragettes. Steichen, passionné de nouvelles expériences était un écologiste et artiste conceptuel avant la lettre. Retiré à Voulangis (Paris) avec sa famille, ce passionné étudie la génétique et cultive par moments 100.000 fleurs. En 1913, ses delphiniums hybrides remportent la Médaille d’or (Paris) suivie par le Prix de la meilleure récolte de pommes de terre (Seine-et-Marne)!

En 1936, pour sa première exposition personnelle, (à ses frais), le photographe osera exhiber des centaines de delphiniums au vénérable MoMA New York. Un choc. Il est question également de la relation à la fois constructive et conflictuelle avec Alfred Stieglitz, son partenaire de la galerie avant-gardiste 291 New York. Puis de l’apparente contradiction entre les idées socialistes de Steichen contre la pauvreté et le fascisme, et une nouvelle société consommatrice capitaliste pour laquelle il travaille (portraits de célébrités et photos publicitaires fort originales). Ce qui ne l’empêche pas de rester attaché aux démunis et aux petites gens.

Des grains de riz et cubes de sucre

Un des chapitres les plus captivants concerne les arts appliqués et le „modern style“. Steichen, designer, crée les décors géométriques pour deux pianos et, sollicité par le fabricant suisse des soieries Stehli Silk, il conçoit toute une gamme de motifs photographiques abstraits: allumettes, grains de riz ou autres arrangements rythmés de cubes de sucre ou de boules antimites.

Finalement, l’aspect de défenseur des arts se concrétise lors du fameux procès „Brancusi v. United States“. La sculpture „L’oiseau dans l’espace“ est considérée comme simple objet en métal par l’administration des douanes et taxable comme tel. En 1928, la justice donnera raison à Steichen. L’auteur propose un ouvrage dense aux nombreuses références. L’amateur pourra compléter cette lecture par le catalogue exhaustif de Todd & Ewing, 2007 (rétrospective au „Jeu de Paume“ Paris).

„Edward Steichen“ Gerd Hurm, format poche, Editions Saint-Paul en collaboration avec le CNA.