L’histoire du temps présentJanvier 1942: le bâton et la carotte

L’histoire du temps présent / Janvier 1942: le bâton et la carotte
Des collaborateurs fascistes luxembourgeois escortés par des résistants luxembourgeois après la libération de la ville de Luxembourg, le 10 septembre 1944 Photo: archives Revue/PID

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En janvier 1942, il y a exactement 80 ans, l’occupation était entrée dans une phase nouvelle. A celle de la collaboration succédait celle de l’ambiguïté. Si les gestes de mécontentement se multipliaient, ils étaient encore rarement étalés en public. S’ils restaient donc inoffensifs à titre individuel, leur multiplication devenait inquiétante pour le régime nazi. Celui-ci réagit tout à la fois en tentant une dernière offensive de charme et en montrant ses dents.

Durant l’hiver 1941/42, les rapports faisant état d’une dégradation de l’opinion publique au Luxembourg s’étaient multipliés. Le fiasco du recensement organisé par le Gauleiter Simon en octobre 1941, l’échec de la Wehrmacht devant Moscou et l’entrée en guerre des Etats-Unis, deux mois plus tard, avaient amené cette majorité de la population qui avait cru en l’inéluctabilité de la victoire allemande à revoir son jugement.

Des signes de déliquescence étaient apparus jusqu’au sein de la Volksdeutsche Bewegung (VdB). Ses cadres les plus motivés observaient des manquements de plus en plus fréquents aux symboles et rituels du parti: refus de porter l’insigne, l’uniforme, de faire le salut hitlérien, etc. Ils faisaient aussi savoir à leurs supérieurs qu’il était devenu extrêmement compliqué de convaincre des adhérents d’exercer des fonctions dans les sections locales.

Des actes d’opposition bon enfant

Le Sicherheitsdienst (SD), qui avait plutôt l’habitude de souligner le moindre acte d’opposition ne dressait cependant pas un portrait entièrement négatif de la situation. Dans son rapport sur la situation et l’opinion au Luxembourg du 14 janvier 1942, il faisait ainsi valoir que, lors de la dernière campagne de dons au Winterhilfswerk (WHW), les Luxembourgeois avaient fait preuve d’une générosité proportionnellement plus importante que les „Allemands du Reich“. La population du Bassin minier s’était particulièrement distinguée lors de la collecte1).

Le manque croissant de respect pour les symboles du nazisme avait encore des côtés bon enfant. Le fait que les insignes de la VdB avaient tendance, depuis quelque temps, à disparaître des tenues était ainsi devenu le sujet d’une blague dans l’arrondissement industriel d’Esch-sur-Alzette: „Alle VdB-Abzeichen werden gesammelt und an die Ostfront geschickt, denn die Abzeichen mit der Aufschrift ,Heim ins Reich‘ wollen jetzt die deutschen Soldaten tragen.“2)

Les gestes d’opposition, comme ces blagues qui tournaient l’armée allemande en dérision ou comme le port persistant du béret basque, affichage d’une francophilie sournoise selon les agents du SD, restaient donc discrets. Ce n’était véritablement que sous l’effet de l’alcool qu’ils s’exprimaient ouvertement dans l’espace public.

Ainsi, le 6 janvier 1942, peu après minuit, un habitant d’Esch avait entonné la chanson „Lëtzebuerg de Lëtzebuerger“, interdite par les autorités allemandes. Appréhendé par un SA, il s’était écrié: „Die Tommys kommen auch einmal.“ Dans la nuit du 7 au 8 janvier, deux autres Eschois avaient été arrêtés pour avoir uriné contre un mât de drapeau. Lors de leur interrogatoire, ils avaient par ailleurs expliqué qu’ils ne portaient leurs insignes de la VdB que durant les heures de travail.3)

La sanctuarisation de la VdB et de ses symboles

Le Gauleiter Gustav Simon, chef de l’administration civile allemande au Luxembourg, réagit donc à cette épidémie „d’actes hostiles au Reich“, le plus souvent inoffensifs à titre individuel, mais dangereux par leur multiplication, en brandissant, comme il l’avait toujours fait jusqu’alors, à la fois la carotte et le bâton. Lors d’un discours tenu le 4 janvier devant les cadres de la VdB, il avait encouragé ces derniers „die noch nicht überzeugten Volksgenossen mit dem Herzen zu gewinnen oder sie mit verstandes- und vernunftsmässigen Gründen von der Richtigkeit der unserer Sache zu überzeugen“.

Le même jour pourtant, il avait édicté trois ordonnances qui rendaient sacrosaints la VdB et ses symboles. L’ordonnances „über die Rechtsstellung der VdB in Luxemburg“ en faisait une collectivité de droit public; quant à celles „über Abzeichen und Symbole der VdB“ et „zum Schutz der nationalen Symbole in Luxemburg“, elles faisaient de l’insigne „Heim ins Reich“ l’insigne officiel du mouvement, du lion rouge son blason, et plaçaient ces symboles sous la protection de la loi.4) Tout manque de respect à leur égard devenait un crime de lèse-majesté.

Au mois de février 1942, le Gauleiter devait également promulguer une ordonnance prévoyant des peines d’emprisonnement – „sofern nicht nach anderen Vorschriften eine strengere Strafe verwirkt wird“ – contre tout individu „troublant la paix intérieure“.5) Etait visé quiconque se livrerait à des détériorations sur des „öffentliche Einrichtungen, die der Propaganda und der Nachrichtenvermittlung dienen“. Elle permettait aussi aux autorités allemandes de sévir „wenn jemand zum Boykott auffordert oder in sonstiger Weise einem anderen aus politischen Gründen Nachteile zufügt oder androht“ – preuve que certains pro-allemands étaient désormais traités comme des pestiférés par leurs compatriotes.

La lutte contre l’„émigration illicite“

Le régime nazi intensifia aussi sa répression contre tous ceux qui tentaient de quitter illégalement le territoire occupé du Luxembourg ou ceux qui les y aidaient – ce qui fit que renforcer la crainte des Luxembourgeois de se voir sous peu imposer un service militaire obligatoire dans les armées allemandes. Dès le 14 octobre 1941, Simon avait promulgué une ordonnance punissant de mort l’„émigration illicite“. Celle-ci visait en premier lieu les jeunes gens qui cherchaient à se soustraire au Reichsarbeitsdienst (RAD), obligatoire depuis mai 1941. Comme le relevait un rapport adressé au gouvernement en exil, elle entérinait une politique répressive engagée au lendemain de l’échec du recensement:

„Déjà le 10 octobre 1941 deux jeunes gens d’Esch, Nicolas Peiffer, 20 ans, et Nic Jaminet, 22 ans, avaient été condamnés par le Tribunal spécial à des peines correctionnelles. Ils s’étaient mis en route le 29 juin 1941 pour le Midi de la France, le premier pour se soustraire à son obligation vis-à-vis du Service de Travail pour lequel il avait passé la révision 5 jours auparavant et là il avait été déclaré apte pour ledit service; le second également astreint au Service de Travail, mais n’ayant pas encore passé la révision, voulut se soustraire à celle-ci [sic.]. La police les arrêta à Russange. Peiffer eut deux ans, Jaminet un an et trois mois de travaux forcés. Le Procureur d’Etat critiqua en termes très véhéments la conduite des deux prévenus ,qui voulaient se soustraire par la fuite à ce service qui est un service d’honneur et devenu l’un des symboles les plus marquants du national-socialisme‘. Au début du mois d’octobre, six d’un groupe de sept jeunes gens qui avaient voulu émigrer clandestinement furent arrêtés par les Allemands lors d’une rafle dans un hôtel de Belfort. […] A Mulhouse un jeune Luxembourgeois ayant été découvert dans un train de marchandises, tira sur un agent de la Gestapo qu’il tua, pour se suicider ensuite. De nombreux jeunes Luxembourgeois qui auraient dû se présenter pour la révision de la classe 1920 se tiennent cachés dans le Grand-Duché.“6)

Le sang coule

C’est enfin au début de l’année 1942 que furent châtiés ceux qui étaient tenus pour responsables de l’échec du référendum d’octobre 1941. Quelques semaines après l’annulation de ce dernier, la Gestapo avait arrêté près de 200 résistants. L’état-major des LFK (Letzeburger Freihétskämpfer) avait été anéanti. Les prisonniers comparurent devant le Sondergericht qui, à partir de début décembre, prononça des peines plus sévères.7) Une étape tragique fut franchie le 23 février 1942 lorsqu’il prononça les deux premières condamnations à mort. La date elle-même était un message adressé à la population, il s’agissait en effet du jour anniversaire de la Grande-Duchesse Charlotte. Le 12 février les dirigeants des LFK, arrêtés quatre mois plus tôt furent à leur tour condamnés à la peine capitale et décapités à la hache à la prison de Köln-Klingelpütz.

          

1) Archives nationales de Luxembourg (ANLux), Fonds Chef der Zivilverwaltung (CdZ), SD 031, cinquième dossier, rapport du 14 janvier 1942.

2) Idem.

3) Idem.

4) Idem.

5) ANLux, Fonds Affaires étrangères (AE), Gouvernement en exil (Gt Ex) 380, Copy of a news report received by E. Krier on the 23rd February 1942.

6) Idem.

7) ANLux, CDZ, SD 031, rapport du 9 décembre 1941.

Robert Hottua
16. Januar 2022 - 12.23

Guten Tag Herr Artuso, der deutsche Historiker Frank Sparing weist darauf hin, daß ab September 1942 die rassenhygienische Mordagenda im lux. Gesundheitswesen von Dr. Heinrich Schäfgen, dem deutschen Euthanasiebeauftragten aus der Massenmord-Heilanstalt aus Düren vollzogen wurde. Schon seit 1933 erhielt dieses rassenhygienische Vernichtungsprogramm die Befürwortung seitens der mentalen Bombenleger aus dem Luxemburger Wort. Diese untilgbare luxemburgische Schuld muß von einer internationalen Wahrheits- und Versöhnungskommission aufgearbeitet werden. MfG Robert Hottua, Gründer der LGSP (Luxemburgische Gesellschaft für Sozialpsychiatrie)