LeserforumLa dictature sanitaire contre l’esprit des lumières 

Leserforum / La dictature sanitaire contre l’esprit des lumières 
 Photo: AFP/Anne-Christine Poujoulat

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14 juillet 2021: à l’heure où j’écris ces lignes, depuis Bruxelles, capitale de l’Europe, la France – glorieux pays des Lumières et du très éclairé Voltaire avec son indépassable Traité sur la Tolérance, magnifique patrie des droits de l’Homme et de l’admirable Zola avec son très courageux J’Accuse au temps de l’indigne affaire Dreyfus – célèbre en grandes pompes, sur la plus belle avenue du monde, son historique Révolution. Soit: On ne dira jamais assez, en effet, combien le monde libre et civilisé, l’esprit démocratique même, lui doit! Le non moins précieux Montesquieu, paré de son insigne Esprit des Lois, en est, à ce titre, l’un des garants philosophiques les plus exemplaires. Dont acte! Et, pourtant, l’on se demande bien aujourd’hui, à l’heure donc où j’écris ces lignes, fût-ce de l’extérieur, mais néanmoins doté peut-être ainsi là du recul nécessaire pour évaluer d’autant mieux la situation, ce que cette même France a réellement conservé, en ces sombres jours de pandémie planétaire, de ce brillant héritage intellectuel, sinon moral.

Citoyens, vos papiers!

Car la question, à voir comment l’actuel et jeune Président, Emmanuel Macron, de cette vieille mais vénérable République se comporte, au mépris de toute considération des institutions démocratiques, pour diriger ses concitoyens, de manière unilatérale („verticale“ disent les nostalgiques de l’ancien régime monarchique) et sans jamais consulter au préalable les instances démocratiques, dont le Parlement (l’Assemblée nationale), pourtant censé représenter le peuple en une démocratie digne de ce nom, peut, très légitimement, se poser. Davantage: ce sont les airs grandiloquents, quoiqu’en réalité minables, d’un petit dictateur, comme rehaussé artificiellement là par l’ombre tutélaire de l’immense dame de fer (la Tour Eiffel), qui s’est orgueilleusement donné à voir, il y a deux jours seulement, ce 12 juillet 2021, pour, via l’infâme et très discriminatoire „pass sanitaire“, dicter au Français, sans leur demander leur avis de surcroît, l’impérieuse marche à suivre désormais, à partir de ce 21 juillet, pour pouvoir vivre, ne serait-ce que „normalement“ et jusque dans les gestes les plus modestes, sinon anodins et même banals, du quotidien: aller faire ses courses dans un centre commercial, se désaltérer à une terrasse de café, se sustenter dans un restaurant, regarder un bon film dans une salle de cinéma, assister à une pièce de théâtre, aller voir une exposition dans une galerie d’art ou un musée, se rendre à un événement culturel, pratiquer un sport en salle, nager dans une piscine. Et pour aller simplement aux toilettes dans un lieu public? On imagine le garçon de café, la serveuse ou la vendeuse, vous demander, pour ce faire, votre sacro-saint laisser passer: „Bitte, Ausweis! Citoyens, vos papiers! Une, deux: marche!“ Et ces policiers ou gendarmes qui, tout en n’étant pas eux-mêmes obligés de se faire vacciner, auront cependant le droit, dieu sait par quel miracle sinon celui d’une société policière précisément, de vous mettre une amende carabinée si vous, simple citoyen et commun des mortels, n’êtes pas en règle avec ce fameux pass, désormais sésame d’entre les sésames!

Un petit air de Vichy: contrôle à tous les âges

Bref: la France d’aujourd’hui, ce n’est plus „eau et gaz à tous les étages“; c’est, au-dessus de douze ans, „contrôle à tous les âges“, avec l’odieuse délation qui, à n’en pas douter, l’accompagnera, malheureusement, chez les plus zélés de cette odieuse, mais pas si nouvelle, flicaille! Ah, de triste mémoire, ce petit air, nauséabond, de Vichy, où, sous la férule d’un certain Maréchal (que, par charité chrétienne, je ne nommerai pas ici), les collabos de tous poils, hélas, s’en donnaient, contre une poignée de vaillants et héroïques Résistants, à cœur joie!

Oui, consternés, sinon sidérés, les vrais humanistes se le demandent, aujourd’hui, au tréfonds de leur âme, très sincèrement: comment la France des Lumières et de Voltaire, de Zola et de Bernard Lazare, de De Gaulle et de Jean Moulin peut-elle tomber aussi bas, être aussi vile et servile, à faire pâlir d’envie, probablement, même un dictateur, en plein cœur de l’Europe là aussi, tel que Viktor Orban! Macron, pire, sous prétexte d’endiguer ainsi la pandémie de la Covid-19 et autres variants, qu’Orban? La question, de fait, mérite à tout le moins, sans vouloir certes comparer ici l’incomparable, d’être posée, quoique nantie là, bien évidemment, des précautions d’usage!

Longtemps, depuis les Lumières donc, la France fut le phare de l’Europe, sinon du monde. Aujourd’hui, sous Macron, elle en est la honte! Et cette France que j’ai tant aimée, admirée jusqu’à l’idéaliser – celle de la belle langue et de la phrase ciselée, du style et de la raison, des Encyclopédistes et de Chateaubriand, de Stendhal et de Flaubert, de Jaurès et de Camus –, je ne la reconnais plus! Quel immense gâchis! Quelle lamentable régression! Quel cuisant échec! Quelle amère et cruelle déception! Reste à espérer que le Conseil constitutionnel invalidera, dans les semaines à venir, pareille forfaiture, prise et exécutée en dehors de l’authentique „Esprit des Lois“ justement, sans lequel il n’est point de démocratie qui vaille!

Discours de la servitude volontaire

D’où, à ce stade de l’analyse, cette importante, cruciale et urgente interrogation: comment comprendre, ne serait-ce que sur le plan psychologique, qu’un peuple – les Français, en l’occurrence – accepte aussi facilement, aussi servilement et quasi même délibérément, d’être à ce point obéissant ou soumis, comme anesthésié dans sa conscience même d’êtres libres, face à ces directives et privations qui leur sont ainsi quotidiennement imposées, souvent en dépit de tout bon sens et sans aucun discernement de surcroît? C’est par ailleurs là, au faîte de cet étrange paradoxe, l’adéquate et juste question que se posait déjà au XVIe siècle, quoique certes en un tout autre contexte sociopolitique, cet esprit éminemment libre, indépendant, courageux, brillant, cultivé et intelligent qu’était Etienne de La Boétie, ami du sceptique mais sage Montaigne, dans son oxymorique mais très rationnel Discours de la servitude volontaire (1576), au sein duquel il critiquait ouvertement, de manière plus spécifique, la tyrannie. De fait, y déplore-t-il, non sans une once, en tous points justifiée, d’indignation, d’étonnement et de révolte tout à la fois: „Pour ce coup, je ne voudrais (rien) sinon entendre comme il se peut faire que tant d’hommes, tant de bourgs, tant de villes, tant de nations endurent quelquefois un tyran seul, qui n’a puissance que celle qu’ils lui donnent; qui n’a pouvoir de leur nuire, sinon qu’ils ont pouvoir de l’endurer; qui ne saurait leur faire mal aucun, sinon lorsqu’ils aiment mieux le souffrir que lui contredire. Grand’chose certes, et toutefois si commune (…), voir un million d’hommes servir misérablement, ayant le col sous le joug, non pas contraints par une plus grande force, mais aucunement (…) enchantés et charmés par le nom seul d’un, duquel ils ne doivent ni craindre la puissance, puisqu’il est seul, ni aimer les qualités puisqu’il est en leur endroit inhumain et sauvage. La faiblesse d’entre nous hommes est telle, qu’il faut souvent que nous obéissions à la force ;  (…). Mais, ô bon Dieu! que peut être cela? comment dirons-nous que cela s’appelle? quel malheur est celui-là? quel vice, ou plutôt quel malheureux vice? Voir un nombre infini de personnes non pas obéir, mais servir; non pas être gouvernés, mais tyrannisés, (…) n’ayant ni leur vie même qui soit à eux!“
Autrement dit, en résumé: les dictatures ne sont fortes, par notre propre faute, que de notre seule faiblesse ou, pis encore, que de notre „servitude volontaire“ précisément, lorsque nous abandonnons volontairement, par lâcheté, ce bien suprême, théoriquement souverain et fondateur de notre humanité même, qu’est notre liberté, individuelle ou collective qu’elle soit, au simple pouvoir d’un „maître“, surtout s’il ne se montre pas bienveillant, amène ou aimable, à notre égard!

Les mots de Stéphane Hessel: „Indignez-vous! Engagez-vous!“

D’où, en guise de conclusion et tel un salutaire manifeste de résistance à cette ignoble dictature pseudo-sanitaire, elle-même doublée d’une obsessive oppression hygiéniste, cet appel aussi pressant qu’urgent lancé, il n’y a guère si longtemps, à ses semblables – mais que je fais ici mien aussi – de mon ami feu Stéphane Hessel, juif rescapé des camps de concentration nazis et admirable auteur du premier volet de la charte des droits de l’Homme au sein des Nations-Unies (ONU), dans son ultime, court mais précieux, diptyque philosophico-littéraire: Indignez-vous! Engagez-vous! Il est grand temps, pour un nouvel et sain humanisme et pour, enfin, que notre belle et glorieuse civilisation ne meure point, en désespoir de cause, sous les mortifères assauts de sa propre tentation totalitaire, de sa seule et coupable indignité, voire de son dangereux manque de sagesse, sinon de simple intelligence!

Le serment d’Hippocrate devenu le serment d’hypocrite

Ainsi, combien de temps encore accepterons-nous de ployer indéfiniment l’échine, sans mot dire, sous les insupportables diktats des nouveaux dictateurs de ce qui apparaît bien plutôt ici, détournant là en sens négatif la fameuse formule de Leibniz en ses Essais de Théodicée, comme le pire des mondes possibles: la barbarie à l’hypocrite et d’autant plus redoutable visage technoscientifique! L’antique, docte et vénérable „serment d’Hippocrate“ devenu ainsi, aujourd’hui, le moderne, stupide et méprisable „serment d’hypocrite“!

Et, face à ces intolérables abus de pouvoir, devant ces insanes, méprisables mais exténuantes insultes au bon sens (que Descartes, dès la première phrase de son très docte et même savant Discours de la méthode, réputait pourtant être erronément „la chose du monde la mieux partagée“), à quand, sinon la désobéissance civile, du moins l’impérieuse révolte individuelle, à défaut de réel sursaut collectif? A quand, sinon la sédition des peuples, du moins le bienveillant mais vigilant et résolu réveil des consciences, sans certes pour autant verser dans la violence et tout en restant pacifiques? Car il est des moments, dans l’histoire d’une nation, où il faut savoir désobéir – c’est même parfois là, avec le recul du temps, l’honneur d’un peuple – face à l’infamie, la scélératesse ou l’abjection!

Au seul et beau nom de la liberté

Entendons-nous, afin que mon discours ne se voit point récupéré par qui que ce soit, et soyons clairs une bonne fois pour toutes: je dis tout ceci en dehors de tout esprit partisan sur le plan idéologique; il s’agit là d’un constat purement neutre et objectif, philosophique et moral, sans aucun calcul électoral ni arrière-pensée politique! De même, je ne nie bien évidemment pas ici ni l’ampleur ni la gravité de cette pandémie; prétendre le contraire serait irresponsable et même criminel. Ce que, en revanche, je critique et conteste ici, à l’instar de bon nombre de mes pairs, c’est la manière, dictatoriale, dont Macron vient d’instaurer, du jour au lendemain et par son seul pouvoir, ce „pass sanitaire“, donnant ainsi lieu à une véritable dérive autoritaire.

Mourir, oui! Mais mourir debout, les yeux grand ouverts, vifs et lucides, vers ce que l’on peut encore sauver – car tant qu’il y a encore un peu de vie, qu’il existe une once d’espoir, fût-elle minime, il n’est jamais trop tard – de notre chancelante, indigente et moribonde humanité en ce début de deuxième décennie du XXIe siècle. Au seul, beau et précieux nom de la liberté !

* Philosophe, auteur, en relation avec la crise sanitaire du coronavirus, du livre „Le meilleur des mondes possibles“ (Editions Samsa), coécrit avec Robert Redeker et Elsa Godart (avec la participation d’Audrey Palma) et enrichi d’un entretien sur le transhumanisme avec Luc Ferry.

Pauvre France
22. Juli 2021 - 9.05

Tant que les médias et les finances sont dirigés par la même clique il n'y aura pas de lumière en France. Ce pays se trouve actuellement au niveau du Moyen Âge par son abus de pouvoir vis-à-vis de la population et par son racisme d'Etat dirigé ouvertement contre la communauté musulmane dans son pays. Les lumières, c'est tout à fait autre chose, c'est l'ouverture d'esprit, c'est le respect des valeurs d'autrui.

Schlime Marguerite
21. Juli 2021 - 14.23

Un grand merci au Tageblatt d'avoir publié cet article précieux de Schiffer. Une consolation vu la doxa. Cela nous fait du bien! La France souffre profondément et attend désespérément que la gauche se réveille!

jan
20. Juli 2021 - 18.05

Mais les Lumières n'éteient pas tous des cons! Bien qu'il faille remarquer que Louis Pasteur n'avait pas un parcours facile lui non plus.

DanV
20. Juli 2021 - 12.53

Tja, wann een eppes esou schwäermeresch op e Podest stellt, gëtt een natierlech enttäuscht ...

jean-pierre goelff
20. Juli 2021 - 11.37

Citoyens d'Europe,venez,venez,en France vous pourrez contempler une équipe gouvernementale qui perd complètement les pédales!