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Forum / Pas de progrès sans les femmes
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„Aucune lutte ne peut aboutir sans que les femmes y participent aux côtés des hommes. Il y a deux pouvoirs dans le monde. L’un celui de l’épée, l’autre celui de la plume. Il en existe un troisième plus fort encore que les deux premiers: celui des femmes“, dixit Malala Yousafzai, Prix Nobel de la paix et célèbre militante pakistanaise des droits des femmes. Elle a bien raison. Demain, aujourd’hui et hier, il n’y a pas de mouvements vers le progrès auxquels les femmes ne participent pas.

Tout simplement déjà, parce qu’il ne saurait y avoir d’histoire en excluant la moitié d’humanité. D’un point de vue numérique, la gent féminine représente de fait la moitié des êtres humains de notre planète, il semble donc juste, mais surtout nécessaire qu’elle prenne sa part aux mutations, évolutions et bousculements de nos sociétés. Elles sont malheureusement souvent oubliées, passées sous silence ou reléguées au rang d’actrices secondaires dans les historiographies essentiellement écrites par des hommes. Mais les femmes étaient et sont de tous les combats.

En vérité, il ne faut pas chercher très loin ou très longtemps pour identifier des exemples concrets, comme la place des femmes dans la Révolution française notamment, pour n’en citer qu’un, mais cela vaut en général pour tous les mouvements sociaux des siècles passés et actuels. Aussi, leur importance ne se résume pas seulement à quelques grandes figures peut-être un peu plus connues, mais toujours pas reconnues à leur juste valeur, comme Olympe de Gouges, Théroigne de Méricourt, Pauline Léon ou encore plus tard dans l’histoire Flora Tristan, Louise Michel, Clara Zetkin ou Simone de Beauvoir pour en rester à quelques-unes des plus célèbres.

Un engagement peut en cacher un autre

L’historien français Jules Michelet retrace néanmoins dans son „Histoire de la Révolution française“ la première grande marche des femmes, celle à Versailles en octobre 1789: „Les hommes ont fait le 14 juillet, les femmes le 6 octobre. Les hommes ont pris la Bastille royale, et les femmes ont pris la royauté elle-même.“ Michelet choisit de présenter cet épisode non pas comme une simple anecdote, mais comme un mythe fondateur, comme une entrée fracassante des femmes sur la scène politique et révolutionnaire.

Quelques décennies plus tard, lors de la révolte des canuts à Lyon en 1834, Eugénie Niboyet relate les événements comme grande reporter dans son journal, le Conseiller des femmes (hebdomadaire de seize pages qui paraît le samedi et premier journal féministe de province). Elle y observe notamment „une foule armée de fusils, de fourches et de bâtons (…) il y avait dans cette foule grand nombre de femmes“. Par la suite, cette journaliste engagée créera la Voix des femmes qui se réclame „journal quotidien, socialiste et politique, organe des intérêts de toutes“. Dans l’éditorial du premier numéro, Niboyet rédige sa profession de foi et appelle toutes les femmes à prendre la parole pour contribuer à la conquête d’un nouvel ordre social.

L’engagement féministe de nombreuses militantes du mouvement vers l’égalité va très souvent de pair avec un engagement social en faveur d’une société plus équitable et plus juste. Et ce n’est point un hasard. Car souvent en vérité, les différentes luttes s’influencent les unes les autres. L’intersectionnalité, c’est-à-dire la théorie qui vise à comprendre la complexité des identités et des inégalités sociales par une approche commune n’est pas une invention du féminisme moderne. Même si le mot n’existait pas aux 19e et 20e siècles, la juxtaposition et le croisement des engagements féministe et social étaient bel et bien une réalité pour de nombreuses femmes qui se sont mêlées de l’actualité politique.

Liberté, égalité, justice sociale

„Die Freiheit ist unteilbar! Also freie Männer dürfen keine Sklaven neben sich dulden – also auch keine Sklavinnen“, préconisait la femme de lettres et féministe allemande Louise Otto en 1849. La liberté et la justice sociale ont par ailleurs ceci de commun qu’elles sont indivisibles. Aujourd’hui aussi. En effet, elles ne deviennent réalité que si elles s’appliquent collectivement à toute l’humanité. Elles doivent forcément se conjuguer au masculin, au féminin et pour tous les genres, pour toutes les personnes indépendamment de leur sexe, de leur origine ethnique ou de leur orientation sexuelle.

De même, l’égalité ne sera égalité que si elle vaut pour toutes et tous et non pas seulement pour une minorité. Il n’est guère suffisant de briser le plafond de verre pour quelques happy few si par la suite d’autres femmes et d’autres personnes se retrouvent par terre en train de ramasser les débris.

Voilà pourquoi l’engagement véritablement féministe est indissociable d’un engagement social. Voilà pourquoi le féminisme moderne ne doit pas passer sous silence les questions fondamentales d’une rémunération juste, d’une réduction du temps de travail, d’un système de sécurité sociale de qualité et universellement accessible, mais aussi du droit au logement pour toutes et tous et d’une transition écologique et socialement juste. Voilà aussi pourquoi l’engagement des femmes dans le syndicat est primordial.

Car il n’y a pas d’égalité digne de ce nom sans justice sociale et il n’y pas de véritable justice sociale sans égalité.

Nota bene: En 2022, le département des femmes OGBL Equality a édité une brochure intitulée „Les femmes et l’OGBL“ qui met en lumière l’évolution historique de la place des femmes dans l’histoire des syndicats libres au Luxembourg et dans l’OGBL, qui est le premier syndicat représentatif à voter une femme au plus haut niveau de responsabilité, c’est-à-dire à sa présidence nationale.


 Foto: Editpress/Fabrizio Pizzolante

* Michelle Cloos est responsable du département des femmes OGBL Equality.