FranceNouvelles épreuves parlementaires en vue pour un gouvernement Borne peu uni

France / Nouvelles épreuves parlementaires en vue pour un gouvernement Borne peu uni
La première ministre Elisabeth Borne hier devant l’Assemblée nationale Photo: AFP/Stephane de Sakutin

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Le gouvernement a surmonté au Parlement, grâce à un usage répété de l’article 49-3 de la Constitution, et à l’échec non moins répété des motions de censure que l’opposition a déposées en riposte, la longue épreuve budgétaire qui l’attendait pour la rentrée. Mais Mme Borne et son équipe ne sauraient s’estimer tranquilles pour la suite: à peine tournée pour un an cette page délicate, de nouvelles difficultés sérieuses s’annoncent.

„Les emmerdes, aimait à dire Chirac avec sa verdeur de langage coutumière, ça vole toujours en escadrille.“ De fait, la première ministre a de quoi, dans les jours et les semaines qui viennent, s’attendre à un sérieux bombardement de difficultés. Même si, en plantant lundi un nouvel arbre dans le parc de Matignon, comme le veut la tradition après six mois d’exercice, elle a choisi un chêne-vert, réputé pour sa longévité et sa résistance à l’hiver puisqu’il n’y perd pas ses feuilles.

Il y a d’abord eu, ces tout derniers jours, quelques anicroches sans réelle gravité, mais qui traduisent tout de même une dégradation du climat au sein du gouvernement, et nuisent à son image. A commencer par la démission, ni vraiment forcée mais ni vraiment combattue non plus, de la ministre déléguée aux collectivités locales, Caroline Cayeux, accusée par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique d’avoir sous-estimé son patrimoine dans sa déclaration officielle d’entrée en fonction.

„Quand on a des choses à se dire …“

Autre actualité embarrassante pour l’exécutif: des chamailleries entre ministres. Celui des Finances, Bruno Le Maire, ayant estimé (voir Tageblatt du 28 novembre) que le gouvernement avait, dans le passé, abusé du recours aux cabinets de conseil privés, et parlé à ce propos de „dérive“, son collègue porte-parole Olivier Véran, ex-ministre de la Santé, a vivement répliqué qu’il „ne savait pas“ ce qu’était en l’occurrence „un abus ou une dérive“. Même ambiance crispée entre le ministre des Comptes publics, Gabriel Attal, et son collègue Clément Beaune, chargé des Transports, à propos du „droit à la paresse“, que le premier critiquait vertement. Il est vrai que chacun rêve, dit-on, de partir à l’assaut de la mairie de Paris en 2024 …

Encore ne s’agit-il là que de menues embrouilles, dont la répétition finirait tout de même très vite par saper l’autorité de Mme Borne, laquelle a fait rappeler aux intéressés que „quand on a des choses à se dire, le mieux est de le faire en privé, et non dans les médias“.

Mais au-delà de ces accès ponctuels de mauvaise humeur, il semble de plus en plus évident qu’au sein des élus macronistes une certaine irritation inquiète commence à se faire jour face à l’immobilité à laquelle beaucoup de parlementaires craignent de voir le gouvernement condamné. Et cela alors que l’esprit de réforme devait être la marque de fabrique de ce parti, qui s’est d’abord appelé: En marche!, puis aujourd’hui Renaissance.

Retraite, immigration: plus qu’un seul joker

Cet état d’esprit est largement dû au fait que l’absence de majorité parlementaire (autrement que relative ou par défaut) risque, en effet, de paralyser la suite des réformes prévues. En particulier, dès janvier, sur deux sujets emblématiques, et très sensibles: les retraites et l’immigration. Car le système qui a permis au gouvernement de faire adopter vaille que vaille le budget de l’Etat pour 2023, et celui de la Sécurité sociale, après le collectif budgétaire pour 2022, autrement dit le sextuple recours au fameux „49-3“, ne peut fonctionner à répétition pour des projets de loi ordinaires.

C’est même peu dire, puisque ce précieux „joker“ ne pourra plus, constitutionnellement, être utilisé qu’une seule fois durant la session. Pour faire passer la réforme des retraites? Celle de l’immigration? Ou encore pour pallier tel ou tel accident de parcours possible? Certes, rien n’indique que les voix des Républicains feront défaut à ces projets gouvernementaux. Mais il faudra alors beaucoup négocier en amont de la discussion parlementaire proprement dite – et puis ce soutien éventuel de LR achèvera de tirer vers la droite une Macronie dont nombre d’éléments renâclent contre cette évolution.

Enfin, Mme Borne va aussi devoir s’atteler à un dossier aussi complexe qu’inattendu: celui qu’a tranquillement ouvert M. Macron en annonçant sur YouTube la prochaine création de dix Réseaux express régionaux (comme à Paris) autour de métropoles de province. Au nom de l’écologie – dont la première ministre est en principe la patronne en chef – et sans en avoir, semble-t-il, soufflé mot à quiconque au gouvernement … Projet fort coûteux, dont le lancement sera certainement jugé très urgent politiquement par l’Elysée.