Un espoir

Un espoir
(Tageblatt-Archiv)

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Que n’a-t-on dit de Syriza, d’Alexis Tsipras et des Grecs ces derniers temps! Comme si, dans le berceau de la démocratie, s’accumulaient peste et choléra, depuis que le pays s’est effondré et a été mis sous la coupe des banques, du FMI, de la BCE et des ultralibéraux de Bruxelles.

Or, le peuple, les Grecs, les classes moyennes et populaires surtout, ne se sont pas laissé intimider. De longs mois durant, ils sont descendus dans la rue. Et pour finir, ils ont donné, dimanche dernier, dans leur grande majorité leurs voix à Syriza qui leur promet de sortir de la spirale infernale de l’austérité.
Question: pourquoi a-t-on tellement diabolisé Syriza à Bruxelles, Berlin ou Londres? Pourquoi n’a-t-on pas vu ou voulu voir que Tsipras n’a rien ou très peu d’un révolutionnaire ne jurant que sur le drapeau rouge? Qu’en réalité son programme n’est pas loin de celui que défendait, au Bourget, un François Hollande galvanisé par la perspective de la victoire? Un programme n’acceptant pas comme une fatalité que l’austérité soit la seule alternative à la crise qui terrasse l’Europe.

On se souvient de ce „moi, président“, martelé pour fustiger la grande finance qui met à genou les peuples. On s’en souvient, même si l’hôte de l’Elysée l’a presque oublié. Or, c’est justement cela que vient nous rappeler Syriza dont le programme est un classique de la social-démocratie et pourrait signifier le renouveau du réformisme en Europe.
Revendiquer des retraites et des salaires dignes de ce nom n’a rien de radical. Dire halte aux privatisations non plus, Mitterrand ne l’a-t-il pas fait en 1981? Et demander que soit renégociée la dette, qu’il y ait moratoire, qu’elle soit rééchelonnée, où est la radicalité dans cela?

Angela Merkel aurait-t-elle oublié que si l’Allemagne avait dû rembourser la dette que les créanciers lui avaient accordée à la fin de la guerre, elle serait, aujourd’hui, non la locomotive mais la lanterne rouge de l’Europe?
Est-ce aller trop loin? Non. L’Europe, notre Europe, a besoin de voix qui entendent la souffrance populaire. Des voix qui permettent aux peuples de respirer. Des voix qui stoppent net la descente de l’ascenseur social. Et ces voix-là ne peuvent être qu’à gauche.
Oui, n’en déplaise à ceux qui veulent effacer toutes les lignes de friction, une gauche nouvelle est en passe de donner de la voix sur le Vieux continent, et cela rend la droite hystérique. Et il faut que nos gauches à nous, celles qui se sont perdues dans les dédales gouvernementaux et appliquent les dogmes concoctés par Bruxelles, retrouvent elles aussi le chemin de la solidarité avec les citoyens en détresse.

Parce que la Grèce aujourd’hui, l’Espagne demain, l’Irlande après-demain sont autant de bonnes nouvelles qui remettent à l’ordre du jour la question d’une Europe sociale. Parce que, contrairement à ce que dit la droite, Syriza ou Podemos ne sont pas des mouvements anti-européens, mais fustigent, comme devrait le faire tout parti de gauche, le chemin ultralibéral dans lequel l’Europe s’est engagée.
François Hollande et Matteo Renzi, pour ne citer qu’eux, devraient donc se réjouir d’avoir enfin des alliés leur permettant de jouer la carte sociale contre le tout économique prôné par Bruxelles.
Seule ombre dans le tableau, Syriza a dû s’allier, faute de majorité absolue, aux xénophobes du mouvement des Grecs indépendants. Parce que le parti socialiste grec, le Pasok, n’a pas su être à l’écoute de la souffrance populaire. Cela devrait faire réfléchir tous les sociaux-démocrates du continent.

(Danièle Fonck)