Quand Esch 2022 devient une actualité au festival de Villerupt

Quand Esch 2022 devient une actualité au festival de Villerupt
Ariane Bieou, manager culturel de Matera 2019 Photo: Delia Pifarotti

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Ce début de novembre, avec son long weekend de la Toussaint et le temps pluvieux, s’est révélé être l’occasion idéale pour des milliers de spectateurs de fréquenter les salles de cinéma de Villerupt, d’Audun, d’Esch et de Dudelange.

De Delia Pifarotti

Beaucoup de bons films les attendaient, comme „Amare Amaro“ (2018), premier long-métrage auto-produit du réalisateur franco-italien Julien Paolini. Un petit village en Sicile, deux familles s’affrontent. L’une est d’origine française. La méfiance de l’étranger, jusque là en état de veille, devient évidente lorsque la violence apparaît. Le dénouement tragique, inévitable, renvoie à la pure tragédie grecque.

En fait, ce drame émotionnel aux allures de thriller, bien agencé et filmé, est inspiré de la pièce „Antigone“ de Sophocle. Antigone, symbole de l’opposition au pouvoir, veut donner une digne sépulture à son frère, aux dépens de sa propre vie, tout comme Gaetano, interprété par Syrus Shahidi, qui met en danger sa vie et celle de sa compagne. Pour le réalisateur, il s’agit d’une réflexion sur la société d’aujourd’hui. Il met ainsi les fondements de la dramaturgie classique au goût du jour.

„Ma volonté était de parler des valeurs humanistes et de les opposer aux lois rigides de la société. Il s’agit pour moi du dilemme entre les lois de la famille et les lois de la cité au sens grec. J’ai situé l’histoire en Sicile, car j’en aime la multiculturalité“, a-t-il fait savoir aux spectateurs, qui venaient de voir et d’applaudir son film.

Une comédie pop irrévérencieuse

Des moins bons, hélas, les attendaient aussi, comme „I Moschettieri del Re – La penultima missione“ (2018), comédie pop tirée du roman d’Alexandre Dumas père „Les trois Mousquetaires“ (1844), et qui, sous prétexte de vouloir être ironique et fantaisiste, assume des tons franchement irrévérencieux face à la culture et la littérature françaises. A se demander comment des acteurs du calibre de Valerio Mastandrea, Pierfrancesco Favino et Margherita Buy ont bien pu accepter de jouer des rôles aussi simplistes, vulgaires et misogynes. Des petits moments d’hilarité dans la salle, dus à des répliques amusantes, ne suffisent pas à l’expliquer.

Comme le festival de cette année met en évidence la région du Sud de l’Italie, la Basilicate avec Matera, ville plurimillénaire et capitale européenne de la culture pour deux mois encore, c’est une invitée très spéciale qui est arrivée dimanche à Villerupt: Ariane Bieou, manager culturel de Matera 2019.

Des conseils pour Esch 2022

Son expérience dans la gestion de projets culturels et la coordination d’événements artistiques européens dans des espaces publics font d’elle la personne idéale pour prodiguer quelques conseils pour la réalisation du projet ambitieux Esch 2022. Durant notre entretien, elle nous a révélé que l’écriture du projet, le „bid book“, s’était basée sur les caractéristiques de la ville et l’exigence de faire participer au maximum le public. Le côté participatif était donc le sol fertile sur lequel faire croître les autres projets: „Le grand challenge a été celui d’avoir 50 productions originales. On n’a rien acheté, on a tout construit depuis le début!“, a expliqué Bieou et ajouté ensuite: „Il y a donc eu une phase de build-up, ensuite une phase de test et à la fin une phase de production, c‘est-à-dire des événements que l’on voit durant toute l’année, sachant que tout cela a commencé bien avant avec des laboratoires, des rencontres, en impliquant des gens en amont.“

Il est évident que les expérimentations ont continué durant toute l’année et que des partenariats internationaux sont nés. La „legacy“, qui reste sur place, et la distribution, qui quitte le territoire, sont deux aspects importants de l’objectif „open future“.

Bieou a souligné: „Nous avons beaucoup travaillé avec la scène créative locale, que nous avons demandé d’aller découvrir ce qui se passait en Europe et de revenir avec des partenaires et des artistes. Vice versa, nous avons demandé aux artistes choisis de venir à Matera, de produire sur place et de donner une forme participative à tous les projets. Cela pouvait être une école, une maison pour personnes âgées, une communauté des jeunes, n’importe.“

Un processus participatif

A propos de la base d‘une bonne organisation d’une année culturelle Bieou a répondu: „Permettre à tout le monde de rentrer dans le processus ou d’en avoir au moins conscience! C‘est fondamental – et créer ensuite le plus de connections et d’infrastructures possibles. Tout cela fait partie du processus de changement de la ville et demande énormément d’effort, car tous les niveaux sont touchés: le niveau social et politique, ce n’est pas juste du culturel!“

A ceci elle a ajouté: „Il faut aussi se donner le temps nécessaire de bien faire, c’est le conseil que l’on m’avait donné en arrivant à Matera. Ne pas faire tous les projets mais se concentrer sur certains et sur la qualité des rencontres.“

En d’autres termes et sans vouloir être un remède miracle: „Travailler sur le local, pour renforcer ce qui existe, ensuite contaminer“, voilà ce que préconise la manager culturelle. Ou de manière presque poétique: „Composer le programme d’une capitale de la culture, à différence d’un festival ou d’une série d’expositions, c’est comme composer une symphonie. Il n’y a pas de grands ou de petits et l’ambition commune est le développement.“